Interrompues pendant des siècles, les relations entre les pays celtiques, particulièrement entre la Bretagne et le Pays de Galles, se sont renouées à partir du XIXe siècle, à l’époque où l’Occident redécouvrait la richesse et l’héritage culturel celtique. Les recueils de poèmes « gaéliques » publiés en anglais par Mac Pherson entre 1760 et 1763 et attribués à un barde écossais du IIIe siècle, Ossian, fils du roi Fingal, eurent un énorme retentissement dans toute l’Europe. C’était par exemple une des lectures favorites de Napoléon. Une véritable « celtomanie » s’empara de nombreux milieux littéraires « celtiques » couvrant aussi bien les langues et cultures des six pays celtiques que les monuments mégalithiques qui n’avaient en fait rien à voir avec les Celtes.
Des « celtophiles »: Cambry, Le Brigant, La Tour d’Auvergne et d’autres, créerent en 1850 à Paris l'Académie Celtique, à laquelle adhéra dès le début Jean-François Le Gonidec (1775-1838), promoteur de la nouvelle langue littéraire bretonne. Même si cet engouement pour la matière « celtique » était souvent assez farfelue et peu scientifique, il remettait à l’honneur des langues et des traditions populaires longtemps méprisées ou ignorées. On redécouvrit ainsi les Mabinogion au Pays de Galles. En Bretagne, la publication du Barzhaz Breizh, recueil de chants populaires de Bretagne, par Théodore Hersart de La Villemarqué en 1839, devait révéler dans toute l’Europe l’existence d’une véritable langue et d’une culture populaire riche et originale à l’extrème pointe du continent.
L’intérêt pour la matière celtique favorisa les travaux linguistiques et les comparaisons entre les langues celtiques révélèrent leur étroite parenté.
En 1807, Le Gonidec publia sa Grammaire Celto-Bretonne et en 1821 son Dictionnaire Celto-Breton. Comme d’autres Bretons, il avait appris le gallois et avait noué des relations épistolaires avec des Gallois, dont le Révérend Thomas Price qui vint en Bretagne en 1829.
Le resserrement des liens entre le Pays de Talles et la Bretagne a eu également des raisons religieuses.
Le Pays de Galles a connu plusieurs renouveaux religieux au XVIIIe et au XIXe siècles, et lorsque fut créée à Londres la Société de la Bible en 1803, un de ses premiers soucis fut de traduire la Bible en breton et de la propager en Bretagne.
Le Gonidec traduisit d’abord le Nouveau Testament en breton, mais lors de sa parution en 1827 cet ouvrage eut peu de succès en Bretagne et presque tous les exemplaires furent achetés par des Gallois. La Société de la Bible lui demanda ensuite de traduire l'Ancien Testament mais sa traduction, jugée trop « catholique », fut refusée par les Protestants et ne devait être finalement publiée que longtemps après sa mort, en 1866.
Des pasteurs gallois vinrent en Bretagne pour tenter de convertir les Bretons au protestantisme, le Révérend David Jones en 1824 et à nouveau en 1825, John Jenkins qui arriva à Morlaix en 1834 et devait rester jusqu’à sa mort en 1872, et d’autres encore...
Les Bretons de l’Académie Celtique avaient noué des relations épistolaires nombreuses avec des érudits gallois, notamment touts ceux qui étaient regroupés à Londres au sein de la société savante des Cymreigyddion.
A plusieurs reprises, le voyage d’une délégation bretonne au Pays de Galles avait été envisagé. Ce voyage eut lieu en 1838 áa l’occasion de l’Eisteddfod d’Avergavenny (9-12 octobre), c’est à dire du congrès des Cymreigyddion.
Il fut facilité par le fait que l’un des organisateurs du congrès était un Breton, Alexis-François Riou, originaire du Pays Vannetais, marié à une Galloise et résidant au Pays de Galles. Le Gonidec, mourant, ne put participer au voyage, mais la délégation bretonne, partie de Saint-Malo le 29 septembre, comprenait La Villemarqué, Francheville, Marc’hallac’h, Jacuelot du Bois-Rouvray et Antoine du Mauduit.
L’Eisteddfod d’Abergavenny, du 9 au 12 octobre 1838, peut donc être considéré comme le premier congrès interceltique. Le second fut celui de Saint-Brieuc en octobre 1867 auquel participèrent La Villemarqué, Anatole Le Braz, Charles de Gaulle (le grand-oncle du général, qui n’était pas breton mais qui avait appris le breton et se passionnait pour tout ce qui était celtique), ainsi que de nombreux autres érudits et intellectuels bretons et gallois.
En 1899, une délégation bretonne assista à l'Eisteddfod national, le grand festival culturel gallois, à Cardiff, et il fut décidé de tenir en 1901 un Congrès Panceltique à Dublin. De nombreux Bretons y participèrent et cette même année, il fut décidé de créer en Bretagne un Gorsedd du druides à l’image de celui qui avait été créé au Pays de Galles de nombreuses années plus tôt. Le « Gorsedd » eut pour Grand-Druide Le Fustec (1855- 1910) de 1901 à 1903, puis Erwan Vertou de 1903 à 1933, Frañsez Jaffrennou « Taldir » de 1933 à 1956, Per Loisel de 1956 à 1978 et Gwenc’hlan Le Scouézec depuis 1978. Considéré aujourd’hui par beaucoup de militants culturels bretons comme un peu marginal et anachronique, le Gorsedd des Druides regroupa pendant 50 ans la plupart des écrivains et érudits bretons et joua un rôle essentiel dans le rapprochement entre la Bretagne et le Pays de Galles. Après celui de Dublin en 1901, un second Congrès Panceltique fut organisé à Camarthen, au Pays de Galles, en 1904, et un troisième à Édimbourg, en Écosse, en 1907.
L’insurrection irlandaise de Pâques 1916 et quelques années plus tard l’indépendance obtenue par la plus grande partie de l’Irlande (26 comtés sur 32) devaient modifier profondément les relations entre les pays celtiques. Les congrès interceltiques avaient eu jusqu’ici une teinte assez passéiste et ne se distinguaient guère des congrès des autres sociétés savantes. Dorénavant ils allaient être plus vivants, plus engagés et d'avantage tournés vers l’avenir.
Un Gallois de Birkenhead, Evan T. John, en relança le principe en 1917 et des réunions de travail eurent lieu à Neath, au Pays de Galles, en 1918, à Édimbourg en 1920 et à Glasgow en 1921, pour mettre sur pied une organisation permanante, le Congrès Celtique, qui aurait des branches dans chaque pays celtiques et qui aurait pour but de promouvoir les relations et la coopération entre les six pays celtiques, la promotion entre les six pays celtiques, la promotion et l’étude de l’histoire, des langues et des littératures des pays celtiques, le développement de la culture celtique sous toutes ses formes. Chaque année une grand rassemblement des membres du Congrès Celtique se tiendrait dans un pays celtique différent. Douze congrès eurent ainsi lieu dans l’entre-deux-guerres, deux en Bretagne, deux en Irlande, trois dans l’Île de Man, trois en Écosse, mais aucun en Cornouailles.
Les relations interceltiques furent interrompues pendant la seconde guerre mondiale mais un congrès celtique eut lieu à nouveau à Dublin en 1947, un autre au Pays de Galles en 1948 après l’Eisteddfod national. Au congrès de 1949 qui se tint à Bangor, au Pays de Galles, le Congrès Celtique adopta de nouveaux statuts qui sont toujours ceux en vigueur aujourd’hui pour l’essentiel. Les objectifs du Congrès Celtique sont le maintien de la culture, des idéaux et des langues des peuples celtiques, la développement des contacts intellectuels et une coopération étroite entre les associations et organisations des différents pays celtiques. Il fut convenu qu’un congrès international serait désormais tenu chague année dans l’un des pays celtiques, à tour de rôle.
Le premier Congrès Celtique International fut le premier congrès se tenir en Cornouailles, il eut lieu à Truro en 1950.
Le nombre de participants est allé en augmentant d’année en année. Il varie considérablement selon le pays. En raison des difficultés d’accès et de la période de l’année (Pâques), les Congrès Celtiques qui se tiennent à l’Île de Man n’accueillent guère plus d’une centaine de délégués et souvent beaucoup moins. En revanche les Congrès qui se tiennent en Bretagne attirent toujours une participation très importante. Plus de 800 délégués, dont près de 300 Gallois, ont suivi les travaux du Congrès Celtique International de Nantes en 1974, plus de 600 personnes à Lannion en 1981.
Les Congrès Celtiques n’ont plus grand-chose à voir aujourd’hui avec les doctes réunions du début de ce siècle. Il n’y est guère question de linguistique ou d’archéologie mais bien plutôt de la situation présente et future des langues celtiques, de leur place dans la vie publique, dans l’enseignement, à la radio et à la télévision; une place de choix est faite également à l’économie. Le Congrès de Nantes était consacré aux droit culturels des minorités et donné lieu à des discussions passionnées et passionnantes pendant une semaine. Les conférences et les discussions lors Congrès de Lannion, consacrées à « l’actualité et l’avenir des langues celtiques », furent d’un très haut niveau.
Les langues utilisées lors des congrès sont celle(s) du pays d’accueil et l’anglais. Ainsi à Lesneven les travaux auront lieu en breton, en anglais et en français mais une traduction sera également assurée dans les autres langues celtiques pour permettre aux délégués des autres pays celtiques de s’exprimer dans leur langue.
Les délégués des différents pays sont pour la plupart très actifs dans leurs pays respectifs tour au long de l’année et les congrès sont l’occasion pour eux de se retrouver pour échanger des idées et des expériences et nouer des liens de coopération, par exemple pour l’édition commune de livres pour enfants ou pour la réalisation de programmes audiovisuels.
Le Congrès Celtique International est une organisation culturelle qui se tient à l’écart des controverses politiques et religieuses. C’est la principale organisation interceltique aujourd’hui mais d’autres organisations se sont créées à côte.
Il y eut de 1964 à 1968 la tentative éphémère de créer un Congrès Celtique de la Jeunesse (Celtic Youth Congress).
Il y a eu également épisodiquement des congrès d’écrivains des pays celtiques, comme le congrès Taliesin organisé voici quelques années au Pays de Galles.
Dans le domaine musical on peut signaler des festivals comme celui de Lorient depuis 1970, ou celui de Killarney en Irlande.
Dans le domaine de l’audiovisuel le Festival du Cinéma et des Télévisions des Pays Celtiques dont la dernière édition s’est déroulée cette année (1989) à Roscoff.
Dans le domaine de l’entraide interceltique il faut signaler l’existence du Secours Populaire Interceltique (SPI), créé en 1971, qui a par exemple permis, au cours de ces dernières année à plus de 1000 enfants de familles modestes d’Irlande du Nord de venir passer des vacances de paix dans des familles bretonnes.