Le blog de Yannick LE MOING

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Les nouveaux projets urbains en France face aux risques et aux enjeux de la transition économique et écologique

Publié par AMRT sur 12 Décembre 2013, 11:25am

Catégories : #Société et Environnement

Jean-Pierre Sueur, Sénateur, Président de la Commission des lois du Sénat.

Quelles villes voulons-nous pour dans 20 ans ou 50 ans ?

Les décisions que nous prenons - ou ne prenons pas - aujourd'hui engagent l'avenir des villes pour 20 ans ou 50 ans. le rapport "Ville du futur et futur des villes, quel avenir pour les villes du Monde ?" que j'ai présenté en 2011 au titre de la Délégation à la Prospective du Sénat cherche à répondre à ces questions. Trois faits pour planter le décor:

1- Combien de nouveaux urbains il y a-t-il dans le monde tous les jours ?

180 000 ! soit 70 millions tous les ans, 1 milliard dans treize ans. Ce mouvement extrêmement massif et mondial est un fait incontournable.

2- La densité des villes est, à priori (et contrairement aux idées reçues) écologique:

les transports consomment 10 fois plus d'énergie dans une ville étalée (comme Atlanta, ayant une surface 26 fois plus grande que Barcelone) que dans une ville plus dense (comme Barcelone qui compte cependant plus d'habitants). mais l'hyper densité, le développement urbain en nappes concentrées conduit à l'embolie.

3- En 2010, il y avait 1 milliard d'humains dans les bidonvilles ou des habitations très pauvres. En 2020 il y en aura 1,5 milliards si rien ne change.

On ne peut se passer de l'effort de prospective, même si ses résultats sont par nature incertains. Seul cet effort peut donner un sens aux projets nécessaires.

La ville actuelle est née de la grande industrie, avec l'afflux massif d'urbains venus des campagnes, avec de grands ensembles, les grandes surfaces et l'adaptation de la ville à la voiture. Cela a façonné la physionomie de la ville actuelle, faite de mono fonctionnels:

les centres-villes (patrimoniaux), les faubourgs, les périphéries verticales et les périphéries horizontales (à vocation exclusivement d'habitation), les entrées de villes - 600 entrées de villes plutôt laides en France - dédiées au seul commerce, les campus universitaires souvent perdus hors de la ville, les zones de loisirs (exclusivement dédiées aux loisirs), les zones d'activités (uniquement centrées sur l'activité), les technopôles (réservées aux technologie), etc...

La ville du futur doit être, à l'inverse, celle où la multifonctionnalité se retrouve partout, dans chaque quartier. A la mixité sociale au sein des quartiers doit s'ajouter la mixité fonctionnelle dans chacun d'entre eux. Les deux doivent aller de pair. Si la ville du futur doit être multifonctionnelle dans l'ensemble de sa géographie, elle doit également être multipolaire. Il faut penser dans chaque ville plusieurs pôles, plusieurs centralités. Il faut créer des centres-villes dans les périphéries ou les faubourgs.

J'ajoute que la multifonctionnalité ne passe pas nécessairement par la création de "zones", seraient-elles à vocation sociales. Les ZEP (Zones d'Education Prioritaires) que j'ai pleinement soutenues au départ et dont l'objectif était de réduire la ségrégation, les parents demandant de multiples dérogations pour que leurs enfants soient scolarisés hors de ces zones. Si le "zonage" peut être positif, il faut aussi voir ses nombreuses limites. On peut oeuvrer pour plus d'égalité et de justice, pour donner aux villes une nouvelle "urbanité" sans pour autant s'enfermer dans des zonages.

Il faut une politique globale de la ville portée par un "Ministère de toute la Ville", qui aurait en charge toute la ville, et non pas un "Ministère de la Ville" n'ayant en charge que des quartiers en difficulté, car la ville est un tout.

Au niveau mondial, parce que certaines villes - et certains pays - ne disposent pas en leur sein des ressources nécessaires pour faire face à ces questions, il faut une approche globale. Je préconise dans ce rapport un Fonds mondial pour les villes, comme il y a la FAO ou l'OMS. A ceux qui doutent de l'utilité d'un tel fonds, je redis que le problème des villes sera l'un des principaux enjeux des décennies à venir au plan mondial.

La résorption de ces bidonvilles passe par la construction de réseaux, d'équipements de tous types, permettant de créer peu à peu une vrai urbanité, d'apporter sur un même espace un maximum de services. Aux zones étalées à l'infini, ou hyperdenses et déstructurées, il faut substituer une ville en grappe, en constellation, des logiques plurielles, multifonctionnelles et multipolaires.

Le rapport (disponible sur le site du Sénat) fait ainsi 25 propositions pour la ville du futur.

Extrait des actes du Colloque "Réinventer la ville face aux risques et aux défis à venir !" des 13 et 14 novembre 2013 à Paris, Hôtel de l'Industrie, organisé par le Mastère Spécialisé "Gestion des Risques sur les Territoires" de l'EISTI.

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