Le Sénat a adopté la loi d’avenir en deuxième lecture : des mesures sont prises pour éviter la mise sur le marché de bois et produits issus d’une récolte illégale.
Ainsi, les pays producteurs seront encouragés à structurer leur secteur forestier afin de garantir la légalité du bois qu’ils exportent vers l’Europe ; et les pays importateurs sommés de vérifier à leurs frontières l’origine du bois importé sous peine de saisie et de sanctions.
Le parlement a voté, mais que dit le ministère ?
En effet, différentes enquêtes de Greenpeace et d’autres organisations ont montré que ces documents ne constituaient pas une preuve suffisante de légalité du bois. Dans certains cas, des documents officiels sont émis frauduleusement afin de permettre le blanchiment de bois illégal (ex: Amazonie brésilienne, certificats CITES en RD du Congo); dans d’autres cas, les exportations de bois sont autorisées par le pays d’origine en dépit d’une exploitation marquée par des irrégularités systématiques et massives, dûment documentées et connues des autorités (ex: coupes excédant largement les volumes autorisés ou non paiement des taxes en RDC).
Les contrôles douaniers aux frontières ne prennent pas en compte les éléments d’illégalité tels que le trafic de faux certificats ou le non respect de la législation dans le cadre de l’exploitation dans le pays d’origine. C’est pourquoi l’Union européenne s’est dotée d’une réglementation supplémentaire et spécifique, visant à lutter contre ce type de phénomènes. En France, ce ne sont pas les douanes, mais les services du ministère de l’agriculture et ceux du ministère de l’environnement qui sont chargés de la mise en œuvre de cette réglementation. Le fait qu’une cargaison passe un contrôle douanier et soit donc “dédouanée” ne signifie dans l’absolu que le bois concerné soit légal. Des contrôles plus poussés sont nécessaires, visant à s’assurer que l’importateur a mis en œuvre les procédures dites de diligence raisonnée, qui visent à éliminer le risque d’importation de bois illégal.
Lors de l’action de Greenpeace à La Rochelle, c’était précisément notre demande : une première enquête de diligence raisonné par les services du ministère de l’agriculture.
Lors d’une réunion à la préfecture de Charente maritime, en présence des autorités portuaires nous avions obtenu l’engagement qu’une telle enquête serait menée, et que des agents du ministère vérifieraient que les importateurs ont respecté le règlement européen.
Aujourd’hui, le ministère de l’Agriculture nous déclare dans un échange d’email :
“Les contrôles en bonne et due forme ne peuvent pas avoir lieu tant que la loi n’est pas promulguée. La rencontre de La Rochelle avait un but essentiellement “pédagogique”.”
Comme nous l’avons expliqué au ministère, il est tout a fait possible d’effectuer des contrôles dès maintenant : depuis le 3 mars 2013, le règlement européen donne le pouvoir, et le devoir au ministère de l’Agriculture de contrôler les importateurs et les cargaisons de bois qui entrent en France. L’argument du ministère est fallacieux, et camoufle mal un manque de volonté flagrant.
L’échec des pays européens
La Commission européenne a présenté, le 30 juillet 2014, un bilan de la transcription par les États membres du RBUE (Règlement sur le Bois de l’Union Européenne) dont l’objectif est d’éradiquer les produits de bois d’origine illégale sur le marché européen.
Elle dresse un bilan sous forme de tableau, en fonction de trois critères : désignation des autorités compétentes (en application de l’article 7 du règlement), mise en place d’amendes (en application de l’article 19 du règlement) et formalités de contrôles (en application de l’article 8 du règlement). Les États sont notés en fonction du degré de réalisation de la procédure en droit interne.
Il ressort que 16 États membres sur 28 ont mis en place une procédure complète pour lutter contre le commerce illégal du bois. La France est en très mauvaise position, ne remplissant que le premier critère, et en ayant seulement entamé les procédures pour les deux autres. La Hongrie, n’ayant entrepris aucune démarche, est classée dernière.
Il faut contrôler et appliquer la loi, vite !
Cette mobilisation des associations, des citoyens, a permis cette prise de conscience des députés qui nous laisse espérer, enfin, que la France soit exemplaire dans l’application d’une réglementation qui représente un réel progrès, et permettra de mieux lutter contre la fraude et les atteintes aux droits humains et à l’environnement.