Le blog de Yannick LE MOING

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Au large des Canaries, un chalutier russe déverse son fuel dans l’océan

Publié par Le Monde sur 22 Avril 2015, 08:59am

Catégories : #Société et Environnement

Cinq jours après le naufrage d’un chalutier russe, l’Oleg-Naydenov, du fuel continuait de s’échapper dimanche 19 avril de son épave, qui gît à 2 400 mètres de profondeur et à seulement 24 kilomètres de la côte et des dunes paradisiaques de Maspalomas, au sud de l’île de Gran Canaria. Selon les estimations espagnoles, le navire transportait environ 1 400 tonnes de combustible dans ses réservoirs lorsqu’il a d’abord pris feu, le 11 avril, dans le port de la ville de Las Palmas, puis coulé, le 15 avril, après avoir été remorqué au large par les autorités portuaires.

Selon l’organisation écologiste Greenpeace, qui a effectué un survol de la zone samedi, une nappe de 70 kilomètres de long de fuel et d’huile s’éloigne, en direction du sud-ouest, de la côte mauritanienne et des îles du Cap-Vert. Les autorités ont décidé d’interdire, dimanche, tout survol de la zone.

Alors que le mauvais temps complique la collecte du fuel par les quatre bateaux antipollution dépêchés sur place par le ministère de l’équipement espagnol, la polémique ne cesse d’enfler en Espagne, où la gestion de la catastrophe est mise en cause. « C’est comme si aucune leçon n’avait été tirée de la catastrophe du Prestige, c’est la même maladresse, s’insurge Julio Barea, porte-parole de Greenpeace en Espagne. On voit bien que l’Espagne n’est toujours pas préparée : où sont les plans de gestion d’urgence, où sont les ports refuges ? »

Le pétrolier qui avait fait naufrage au large de la Galice en 2002 transportait dans ses cales 77 000 tonnes de pétrole, contre 1 400 tonnes de fuel pour le chalutier russe Oleg-Naydenov, mais des similitudes entre les deux cas ont été pointées par les écologistes. Comme dans le cas du Prestige, la capitainerie maritime a ainsi pris la décision d’éloigner des côtes, sans bien savoir où, le chalutier.

Coulé près d’une réserve classée

Incapables de maîtriser rapidement l’incendie d’origine inconnue qui s’était déclaré dans la salle des machines le 11 avril, les autorités ont remorqué le chalutier dans la nuit en haute mer, d’abord vers l’est et l’île de Fuerteventura, puis vers l’ouest, et le sud de Gran Canaria. C’est là qu’il a fini par couler, près d’une réserve classée au réseau Natura 2000 pour sa richesse en biodiversité, couloir migratoire des cétacés et une des zones de pêche les plus riches au monde.

« Il n’y avait pas pire décision que celle qui consiste à essayer d’éloigner le problème de l’Espagne, comme si la mer avait des frontières », dénonce Julio Barea, porte-parole de Greenpeace en Espagne.

Dans les eaux de l’archipel canarien, situé face aux côtes marocaines, une trentaine de cétacés ont été observés par les scientifiques, ainsi que plusieurs espèces de tortues marines. En 2006, elle avait été classée comme zone sensible par l’Organisation maritime internationale pour sa vulnérabilité, à cause d’un trafic maritime intense. « Il n’y avait pas pire décision que celle qui consiste à essayer d’éloigner le problème de l’Espagne, comme si la mer avait des frontières, dénonce M. Barea. Il aurait fallu éteindre l’incendie au port, ce qui aurait permis de contrôler la pollution. »

Pour le secrétaire d’État aux infrastructures, Julio Gomez-Pomar, la première préoccupation a été de protéger des vies humaines, la deuxième de préserver les infrastructures portuaires et les autres navires, puis de limiter la contamination maritime. Certains experts s’interrogent cependant sur le protocole suivi. Le président de l’Association espagnole de la marine civile , José Antonio Madiedo, a exprimé ses doutes au site d’information Eldiario.es sur l’utilisation de canons à eau qui ont endommagé le bateau et réduit sa flottabilité, au lieu de la mousse anti-incendie d’usage.

Connu des organisations écologistes

Le capitaine du chalutier a dénoncé l’« erreur très grave de remorquer le bateau hors du port », alors que le parquet chargé des affaires environnementales a ouvert une enquête sur la catastrophe. L’Oleg-Naydenov est bien connu des organisations écologistes.

Greenpeace l’avait déjà dénoncé pour pêche illégale auprès des autorités sénégalaises qui l’avaient arraisonné et finalement libéré en janvier 2014 contre près de un million d’euros de dédommagements.

Le gouvernement espagnol, qui s’est engagé à ne pas utiliser de dispersants chimiques pour ne pas augmenter la pollution sous-marine, devrait poursuivre dans les prochains jours, si le temps le permet, les tentatives de récupérer mécaniquement le fuel en surface. Selon les estimations, seul un tiers du combustible du chalutier a été déversé. Un robot sous-marin capable d’opérer à 2 400 mètres de profondeur devrait effectuer, mardi 21 avril, une mission d’observation afin de déterminer l’état de la carcasse du chalutier et estimer le risque de pollution possible.

Par Sandrine Morel (Madrid, correspondance)

Le chalutier russe  » Oleg- Naydenov  » au large des îles Canaries, le 15 avril.

Le chalutier russe » Oleg- Naydenov » au large des îles Canaries, le 15 avril.

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